samedi 26 juillet 2008

Avant de rentrer en France

Je rentre bientôt en France, pour un mois de vacances ! Quel bonheur … mais avant je tiens à livrer quelques récits afin qu’ils ne restent enfermés, égoïstes, dans ma tête.

Commençons par le plus récent et le plus fou, le plus douloureux. Je me lève un matin et voici l’histoire que l’on me raconte. Ca c’est passé à Makak, durant la nuit, vers les 4 heures du matin. La vraie version, qui la connaît ? en voilà une, âmes sensibles s’abstenir… rappelez vous qu’ici la sorcellerie est bien vivante…
« Un grand père est malade. Sa fille veut faire venir un tradi-praticien (appelé aussi marabout, charlatan, etc.) mais son mari refuse. Il ne veut pas ce genre d’homme chez lui. Mais un jour, sa femme fait tout de même venir ce " guérisseur ". Au moment où celui-ci donne les remèdes au vieux souffrant, sa fille est prise de tremblement… elle en mourra. Pour le mari et la famille de la fille, il ne fait aucun doute que le marabout est coupable, c’est lui qui l’a tué. Ils prennent les machettes et vont à l’auberge où dort le soit disant coupable. Le gars a tenté de s’enfuir, il a dit de faire venir les gendarmes … la justice populaire est reine ici, les machettes ont parlé, le type s’est fait taillé. »
Le corps est resté étendu sur le sol ainsi, le type en caleçon, rouge de son sang : une boucherie dit-on. Ce n’est que la nuit suivante que le corps a été emmené à la morgue. Personnellement, je n’ai pas voulu faire le voyeur, et je n’avais pas envie d’avoir cette image dans la tête ; les gens ont raconté, ils te disent d’aller voir le corps là-bas.
Le lendemain, je regardais le tour de France (étape à Jausiers) dans un bar. Un garçon d’une douzaine d’années arrive et commence à se disputer avec la patronne, pour une histoire d’argent je crois, ils parlaient en bassa. Le garçon était en colère, pleurait. Il lançait des gestes à la patronne, et dans ses mains se trouvait une machette …
L’ethnie bassa est un peu connue pour sa violence, preuve en est. Mais n’a-t-on de récit similaire chez nous, dans nos campagnes ? Pas avec la machette, c’est sûr, plutôt le fusil…



En voici un suivant, plus normal, sans violence. Un récit qui se passe au clair de lune, un jour sans courant.
… Le 20 mai dernier était un jour férié, la fête du travail. Cette année plusieurs membres du collège ont été gratifiés d’une médaille. Des médailles pour avoir travaillé 5, 10, 20 ans. J’ai été très surpris de voir l’importance que portaient ces gens à cette occasion, de la fierté des récipiendaires, tous dans un beau costard. Tard dans l’après-midi, après la cérémonie officielle au centre du village, un pot et des pains chargés à l’œuf ont été servis au collège, avec remise des diplômes. C’est la joie de la famille entière qui s’exprime, les épouses sont là, fières ! Puis chacun organise une petite fête chez lui. C’est là que commence vraiment mon récit. Avec un autre coopérant qui était de passage, nous partons chez une des récipiendaires, que je ne connaissais pas, nous étions invités par une autre amie. Arrivée là bas, c’est la fête camerounaise : Tout le monde est assis à attendre de manger, d’être servi. Après quelques pas de danses et un passage au buffet nous remercions la famille et partons chercher la maison d’un autre prof qui nous avait invité. Il fait déjà nuit, pas de courant. Je ne sais pas où se situe sa maison. C’est une vieille maman qui nous y conduira, par un petit chemin perdu dans la brousse, à la lueur de la lune. Tout est calme, on avance vers l’inconnu, dans le silence. Un instant rare, magique !!! Puis quelques lumières apparaissent et nous voici à faire le tour d’une table éclairée à la bougie, des assiettes à la main. Il faut manger, on ne peut pas refuser ! On nous assoit, nous donne à boire, le ventre déjà plein. On pousse alors, pour rajouter les nouveaux mets et faire honneur à celui qui nous a invités. On reste un moment puis un gars du collège nous emmène voir un autre récipiendaire. On reprend le même chemin, dans l’autre sens, une nouvelle maison nous attend. Et qui dit nouvelle maison, dit aussi nouvelle table remplie de bonnes choses. On entre, et on déguste une fois encore, un jus en plus (imaginez ceux qui préfèrent la bière et le vin…). Le ventre nous pèse sérieusement. Ce sera notre dernière visite, nous n’avons ni la force, ni le ventre d’aller voir ceux qui ont fêté ça plus loin, il se fait déjà tard. Nous rentrons, dans la calme d’un village sans lumière, sans musiques, sous les rayons de l’astre de la nuit. Les multiples mélodies de la forêt nous berceront très paisiblement cette nuit là….